La route géologique de Victor Hugo

Victor Hugo est l’un des écrivains français les plus universellement connus. A ses facettes de poète, de dramaturge et d’écrivain il nous faut en ajouter une nouvelle, peu connue : celle de voyageur et d’écrivain de récits de voyages. Lors de ces voyages, Hugo recherchait une étroite relation avec la nature et des lieux peu fréquentés et peu connus à son époque. Au cours de l’été 1843, il parcourt divers lieux des Pyrénées et de la Côte basque découvrant, par hasard, le petit village de Pasaia et les Monts Jaizkibel-Ulia qui deviennent les plus belles pages de son livre posthume “Alpes et Pyrénées”.

Écrit alors qu’il cheminait sur le Jaizkibel

« En montagne l’âme s’élève et le coeur se purifie ; la pensée s’imprègne de cette paix profonde. Les montagnes de Pasaia ont pour moi deux attraits particuliers. Le premier c’est qu’elles donnent sur la mer (…) le second c’est qu’elles sont en grès. Le grès est la pierre la plus amusante et la plus étrangement pétrie qu’il y ait (…) Il n’y a pas d’apparence qu’il ne prenne, pas de caprice qu’il n’est, pas de rêve qu’il ne réalise ; il a toutes les figures, il réalise toutes les grimaces. Il semble animé d’une âme multiple. Ici à Pasaia, la montagne sculptée et travaillée par les pluies, la mer et le vent est habitée par le grès d’une infinité d’habitants de pierre, mondes immobiles, éternels, presque effrayants.

» …C’est un ermite en habit (…) ce sont des nains avec des becs d’oiseau, des monstres à forme humaine avec deux visages, l’un rit et l’autre pleure (…). Dans le grand drame du paysage, le grès joue le rôle fantasque ; quelquefois grand et sévère quelquefois bouffon ; il se penche comme un lutteur, il se pelotonne comme un clown ; il est éponge, pudding, tente, cabane, souche d’arbre (…) il a des visages qui rient, des yeux qui regardent, des mâchoires qui semblent mordre et brouter la fougère (…). Une montagne de grès est toujours pleine de surprise et d’intérêt. Toutes les fois que la nature morte semble vivre, elle nous émeut d’une émotion étrange. »

Extraits du livre Alpes et Pyrénées.